La santé connaît aujourd’hui une mutation profonde, du fait notamment de la montée en puissance du biomédicament (30% du marché pharmaceutique mondial), et si la France figure parmi les premiers pays européens en nombre d’entreprises développant des biomédicaments, les outils industriels de bioproduction font défaut. Ces capacités de production limitées poussent ainsi les entreprises à s’approvisionner de manière massive hors de France.
La crise sanitaire et les récentes crises d’approvisionnement en médicament de base ont été révélateurs en ce sens, mettant en lumière la nécessité de retrouver une capacité de production en France en engageant une structuration de la filière santé et pharmaceutique et en capitalisant sur ses points forts : coopération entre acteurs institutionnels et privés, capacité à mobiliser des financements pour des projets de santé, utilisation de la donnée en recherche clinique et d’applications digitales à destination de la santé.
La santé fait partie des filières stratégiques identifiées par la Région Ile-de-France dans le cadre de son SRDEII (Impact 2028), qui compte notamment parmi ses objectifs celui de favoriser l’émergence ou l’implantation d’une CDMO (Contract Development Manufactured Organisation – sous-traitant pharmaceutique ayant pour cœur de métier la fabrication et le conditionnement de médicaments à échelle industrielle) en Ile-de-France. La région présente un écosystème important sur la filière :
- Forte concentration d’institutions de recherche universitaires de renommée mondiale dans tous les domaines scientifiques (3 établissements de recherche parmi les 10 plus innovants au monde, 1ère en Europe pour le nombre d’essais cliniques en cours, 1ère en Europe pour le nombre d’entreprises opérant dans le secteur pharmaceutique)
- Plus grand réseau hospitalier d’Europe (AP-HP)
- 140 entreprises répertoriées en 2021, se répartissant pour moitié entre biothérapies et techproviders (fournisseurs de technologie)
- Une soixantaine des entreprises de biothérapies relèvent des activités de R&D (1/2 en biotechnologies).
L’écosystème francilien est très concentré dans la Métropole du Grand Paris (MGP) avec ¾ des entreprises. En dehors de la Métropole du Grand Paris, près du quart restant est situé en nord-Essonne au sein du Genopole d’Evry et sur le plateau de Saclay. En matière de formation, on trouve notamment le campus Biotech Digital, projet né fin 2020 pour accélérer la formation pour accompagner la transformation du secteur, qui est pilotée par un consortium industriel associant bioMérieux, Novasep, Sanofi et Servier et qui regroupe un écosystème national : écoles et organismes de formation en biotechnologies, grandes entreprises du numérique (Atos, IBM, Microsoft). Le projet s’appuie sur des relais territoriaux et un centre de design et d’expertise situé sur le site de Sanofi à Vitry.
En Seine-et-Marne, la filière est insuffisamment développée mais présente un potentiel important sur le volet de l’industrie biopharmaceutique compte-tenu de ses ressources en matière de R&D et de ses disponibilités foncières importantes. La présence du pôle de compétitivité Genopole (1er biocluster de France) à Evry est un atout important pour le territoire, et le Département peut également s’appuyer sur des acteurs de la filière tel que le pôle de compétitivité Medicen, en lien avec le Comité Stratégique de Filière des Industries et Technologies de Santé.
Les Industries de la santé en Ile-de-France
La filière en chiffres
contre 100 000 emplois
Les acteurs de la filière en Seine-et-Marne
Pôles de compétitivité
Institutionnels
Centres et instituts de recherche
Entreprises
Sortir de la monoproduction
Si la France dispose d’une capacité de production importante (271 usines de production pharmaceutique), cette dernière est essentiellement centrée sur la production secondaire (formulation et conditionnement) et non primaire (principes actifs). Ainsi, hormis Sanofi, Pierre Fabre ou Servier, qui produisent leurs principes actifs en interne, la grande majorité des acteurs en France sont largement dépendants des importations (principalement asiatiques) pour leurs approvisionnements.
Outre le type de production, on observe également des difficultés structurelles liées à la taille des entreprises de production pharmaceutique : 50 % sont des PME et de nombreux producteurs sont positionnés sur la fabrication de génériques, très bon marché.
Développer la bioproduction et les biothérapies
Au niveau mondial, le nombre de biomédicaments innovants ne fait qu’augmenter ; ils représentent aujourd’hui 50% des essais en cours et d’ici 2024 totaliseront 32% des ventes de médicaments. Ces biomédicaments innovants restent très complexes à produire avec très peu d’automatisation. Ils nécessitent l’intervention d’un nombre important de personnels qualifiés ce qui contribuent à des thérapies aux tarifs élevés, véritable frein pour le développement de ces médicaments. Si la France figure parmi les premiers pays européens en nombre d’entreprises développant des biomédicaments, l’Hexagone manque d’outils industriels de bioproduction pour permettre à ces entreprises de produire sur le territoire national. Il existe quelques sites de bioproduction (anticorps, thérapie cellulaire et génique), mais la France compte toutefois très peu de façonniers, dits CDMOs (« Contract Development and Manufacturing Organization » – entre 400 et 600 personnes en France avec une présence marginale en Ile-de-France) effectuant de la production pour tiers.
Le segment de la bioproduction est investi par de nombreuses start-ups, mais ces dernières font face à 4 problématiques principales dans leur développement :
- le manque de CDMO en Ile-de-France et en France : la majorité d’entre elles doivent travailler avec des entreprises européennes (Italie, Belgique, Suisse) ou nord-américaines ;
- des relations complexes entre les CDMO et les start-ups : les CDMO vont favoriser des entreprises pharmaceutiques plus matures ;
- les start-ups travaillent à la fois sur l’innovation du biomédicament et sur son processus de fabrication. Hors, les CDMO, qui contrôlent le processus, éprouvent encore des réticences à travailler en partenariat avec les équipes de start-ups.
- les start-ups cherchent des CDMO en capacité de produire aussi bien les lots pré-cliniques que les lots commerciaux. Mais ces structures sont encore relativement rares (on peut citer Ypokesi, implantée au Genopole, qui est une CDMO capable de produire tous les lots).
Focus
(Mitry-Mory)
Leader mondial de la fabrication et distribution de produits et solutions innovantes destinés aux marchés de la recherche en sciences de la vie et du diagnostic médical, cette entreprise américaine fournit aux chercheurs universitaires et industriels des instruments, des logiciels, des consommables, des réactifs dans les secteurs de la biologie cellulaire, la génomique, la protéomique, la découverte de médicaments, la sécurité alimentaire et l’environnement. Premier fournisseur mondial de produits et de services de pointe sur le marché du diagnostic in vitro, BioRad est un acteur majeur de la détection des virus sanguins, du groupage sanguin, de la surveillance du diabète, de la recherche de maladies auto-immunes et du dépistage des maladies infectieuses. Son siège social français est situé à Marnes-la-Coquette (Hauts-de-Seine). En plus du site de Mitry-Mory, elle exploite 2 autres sites en France, à Gémenos (Bouches-du-Rhône) et Steenvoorde (Nord).
(Dammarie-les-Lys)
Les Laboratoires Galéniques Vernin (LGV) sont l’entité de production des laboratoires Mayoly Spindler, laboratoire français, indépendant et international de référence dans les domaines de la gastroentérologie et de la dermo-cosmétique, présent dans plus de 70 pays. Expert du façonnage dans les domaines pharmaceutique, nutraceutique et cosmétique, Mayoly Spindler est doté de ses propres outils de production répartis sur 3 sites de production en Ile-de-France, dont 2 à Dammarie-les-Lys (LGV et LGV Cosmétique).
(Mitry-Mory)
Leader mondial des innovations de bioproduction par l’utilisation de l’acoustophorèse, soit l’utilisation des forces de radiation acoustique visant la manipulation et la préparation des cellules en thérapies cellulaires et géniques. La société est issue de la valorisation de technologies développées par l’ESPCI Paris – PSL et le CNRS (en « spin-off »). Elle fait partie des 8 lauréats de l’AAP France 2030 « Grand défi biomédicament » clôturé en février 2022, pour son projet « ASMA » (2,3 M€ de subventions) visant à améliorer le rendement à échelle industrielle ou pharmaceutique des médicaments de thérapie innovante (MTI).
(Croissy-Beaubourg)
Entreprise américaine, Carestream Dental fournit des solutions et des technologies cloud pour les cabinets dentaires, notamment l’imagerie 3D, l’imagerie céphalométrique et panoramique mais aussi des outils tels que des caméras, des capteurs RVG. L’objectif est de maximiser la pratique par l’intelligence artificielle.
(Lieusaint)
Première banque française d’allogreffes osseuses (greffes d’origine humaine), l’entreprise intervient comme une banque de tissus, du recueil des têtes fémorales jusque la transformation des greffons osseux.
(Nemours)
Lewis Industrie fabrique des pièces en tôlerie de précision pour l’industrie médicale (pièces pour radiologie dentaire, pièce inox analyse de sang, pièce inox pour filtration et purification d’eau, fabrication de mobilier médical, pièces optiques, fabrication de pièce pour matériel de nettoyage).
(Villeparis) Pentaferte est une entreprise qui intervient dans la distribution exclusive sur le territoire national de dispositifs médicaux pour des industriels fabricants européens. L’entreprise intervient sur 3 champs : un pôle « étude-expertise-réalisation » de différents dispositifs en OEM et appareillages « clé en main », les pompes à perfusion ambulatoire et les dispositifs médicaux à usage unique de perfusion et d’urologie de marque PENTA®. Le siège est implanté à Villeparisis et l’usine se trouve en Italie.
(Compans) Novair a implanté sa plateforme logistique internationale à Compans pour sa proximité de l’aéroport Paris Charles de Gaulle et de son usine de Roissy-en-France. L’entreprise expédie dans le monde entier des systèmes de génération d’oxygène médical.
Genopole est un biocluster de réputation mondiale. Il est dédié à la recherche en génomique, génétique et aux biotechnologies. Il a été créé en 1998 à Evry et constitue une des forces de la communauté d’agglomération (CA) Grand Paris Sud.Il concentre 115 000 m² pour les laboratoires académiques, les entreprises, les porteurs de projet, les étudiants, 29 plateformes scientifiques, 16 laboratoires académiques, 96 entreprises et 2 500 emplois salariés directs dont 800 chercheurs. Sur le plan du développement économique, ses principaux objectifs sont l’essor des entreprises de biotechnologies et le renforcement de son positionnement à l’international.
Son développement va générer la construction d’environ 10 000 m² de laboratoires et bureaux à l’horizon 2024. Ces extensions s’accompagnent de la constitution en cours d’un pôle de vie comprenant une résidence de chercheurs et l’ensemble des services de proximité nécessaires. Un enjeu à relever pour ce biocluster est l’amélioration du parcours résidentiel des entreprises tout en assurant la visibilité de l’offre immobilière.
La communauté d’agglomération Grand Paris Sud accueille plusieurs établissements de renom à commencer par l’ETI Généthon d’environ 200 salariés qui développe des thérapies géniques pour des maladies génétiques rares. En mai 2019, la FDA américaine autorisait la mise sur le marché d’un médicament de thérapie génique développé par Novartis pour lequel Généthon a eu un rôle déterminant. Spin-off de Généthon, YposKesi, créée en 2016, est un leadeur européen pour le développement et la production de produits de thérapies géniques et cellulaires. En juin 2019, YposKesi a été sélectionné par Servier pour développer et produire un médicament de thérapie génique contre le cancer. Sebia est spécialisée dans le domaine de la production d’instruments médicaux et de réactifs pour diagnostics in-vitro. C’est un acteur majeur de l’électrophorèse. Sebia est situé à Lisses et compte environ 250 salariés.
Créé en 2005, Medicen Paris Region est le pôle de compétitivité santé de la Région Île-de-France. Son réseau unique fédère plus de 510 acteurs de l’innovation en santé parmi lesquels 430 startups et PME de la healthtech, les industriels de la santé, les principaux instituts de recherche nationaux et établissements de soins du territoire francilien.
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